L'origine des maisons
Leur nombre a sensiblement varie au cours des temps. Quelques chiffres:
Année |
Nombre |
Année |
Nombre |
1783 |
101 |
1866 |
126 |
1836 |
141 |
1910 |
98 |
1846 |
157 |
1939 |
102 |
1851 |
139 |
1975 |
107 |
1856 |
118 |
1981 |
129 |
1861 |
123 |
1990 |
505 |
Ces indications permettent plusieurs constatations. L'habitat a suivi la poussée démographique du XIXe siècle, avec son paroxysme vers 1850. Après une chute sensible, le nombre des maisons se stabilise autour de la centaine; ce chiffre, atteint à la veille de la Révolution déjà, se retrouve encore au début de la deuxième guerre mondiale. Jadis toutes ces maisons étaient construites en colombage, à poutrage apparent. Sous la direction du charpentier, qui surveillait les travaux, la carcasse pouvait se monter et se démonter assez facilement. Souvent, par souci d'économie - le bois d'œuvre du Bienwald du Prince-Évêque coûtait cher - on réutilisait au maximum le bois d'une ancienne construction. La démolition de vieilles maisons aujourd'hui montre clairement que différentes poutres avaient déjà servi auparavant.
Selon une tradition même, les survivants de Durrenseebach auraient récupéré du bois de leurs anciennes demeures, en s'installant à Néewiller. Pour nos paysans, qui ont le sens aigu de la propriété, la construction d'une maison constitue un évènement important. La fin des travaux du gros-œuvre donne lieu à une véritable cérémonie. Après avoir planté un arbre enrubanné sur la poutre faîtière du toit, le charpentier et son équipe chantent à pleins poumons le cantique d'action de grâces du Grosser Gott. Les enfants du village sont associés à la fête et à la bonne humeur; du toit, en effet il pleut non seulement des bonbons, mais aussi des rasades d'eau pour ceux qui les ramassent. Un repas copieux (Richtfest), avec d'abondantes libations, termine la journée et se prolonge tard dans la nuit.
Sur la poutre angulaire, du côté de l'entrée, les nouveaux propriétaires font graver avec satisfaction leurs noms et l'année de la construction. Ces inscriptions se trouvent aussi sur les granges. Ces maisons - leurs constructeurs le savaient bien - ne peuvent être heureuses que sous la protection divine. Pour cette raison, les différents motifs décoratifs gravés sur la poutre angulaire de l'entrée sont toujours surmontés de la croix. Voici un exemple de verset trouvé sur une maison: GOTT SEGNE DIESES HAUS UND ALLE DIE GEHEN EIN UND AUS (Que Dieu bénisse cette maison, tous ceux qui y entrent et tous ceux qui en sortent).
A l'image même du village, nos vieilles maisons alsaciennes sont assez modestes. Le plus souvent, elles ne comprennent qu'un rez-de-chaussée. En 1783, sur 101 maisons, 13 seulement ont un étage. Un siècle plus tard, 1866, ce nombre, pourtant modeste, diminue encore: il n'y en a plus que 8 (sur 126 maisons). Et pourtant, malgré leur exiguïté, elles avaient à loger beaucoup de monde, comme le montre le tableau suivant:
Nombre de personnes à loger |
|||
Année |
Nombre d'habitants |
Nombre de maisons |
Nombre de ménages |
1836 |
833 |
141 |
180 |
1846 |
793 |
157 |
171 |
1851 |
816 |
139 |
169 |
1856 |
636 |
118 |
137 |
1861 |
695 |
123 |
153 |
1866 |
695 |
126 |
163 |
Une quarantaine de nos (petites) maisons abritaient ainsi deux ménages. Et ces derniers comprenaient souvent un effectif nombreux. Un exemple: Sur 153 ménages de 1861, 30 comprennent 7 personnes (et plus) 15 comprennent 6 personnes, 30 comprennent 5 personnes, 19 comprennent 4 personnes, 24 comprennent 3 personnes, 24 comprennent 2 personnes, 11 comprennent 1 personne.
Une grande promiscuité souvent!
Depuis, les familles se sont réduites considérablement. Le nombre
moyen d'occupants de nos maisons a diminué régulièrement:
1784: 6,8 habitants
1866: 5,5 habitants
1962: 4,4 habitants
1975: 3,7 habitants.
Ces maisons avaient presque toutes la même structure. Celles dont l'habitation
et la grange se trouvaient sous le même toit étaient exceptionnelles.
Il en subsiste qu'une seule aujourd'hui qui est désaffectée
depuis longtemps. En général, l'entrée est dans la cour
et donne droit sur la cuisine. D'un côté, une petite chambre
à coucher (Stiwel) pour les parents, de l'autre, vers la rue, la grande
salle de séjour (Stub). C'est le cœur de la maison, avec le coin-repas
et le poêle. C'est là qu'on se réunit avec les amis. Dans
l'angle formé par la rue et la cour, il y a le coin coin du Bon-Dieu"
(Hergottseck) avec un Crucifix ou une statue. Enfin, au fond, l'alcôve
est séparée du reste par une armoire et un rideau. Elle sert
de chambre à coucher aux grands-parents, qui peuvent ainsi participer
à la veillée, bien au chaud dans leur lit.
De ces maisons à colombages, il y en avait encore
une centaine en 1939. La guerre a précipité la perte d'un grand
nombre, mais depuis elles continuent à diminuer régulièrement.
Certaines, depuis longtemps abandonnées, ne servent plus que de débarras,
en attendant un amateur qui veuille récupérer les poutres anciennes.
33 seulement sont encore habitées aujourd'hui, (dont 2 à un
étage) mais pour combien de temps encore?